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«La région de Bâle est très innovatrice dans le domaine de la santé»

Prof. Enkelejda Miho, Head of the Laboratory of Artificial Intelligence for Health (aiHealthLab) at FHNW
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«La région de Bâle est très innovatrice dans le domaine de la santé»

02.04.2019

Un nouveau Master proposé par la Haute école spécialisée du Nord-Ouest de la Suisse (FHNW) vise à préparer la prochaine génération de professionnels dans le secteur des sciences de la vie. Des étudiants en «informatique médicale» sont formés à utiliser les dernières technologies lors de projets des industries médicale et pharmaceutique. Professeur Enkelejda Miho, de l’Institut des technologies médicales et analytiques à la FHNW, est convaincue que la combinaison des sciences de la vie avec l’informatique et le monde des affaires fait émerger un nouveau profil de professionnels prisé.

Prof. Enkelejda Miho, Head of the Laboratory of Artificial Intelligence for Health (aiHealthLab) at FHNW
Enkelejda Miho, Professor of Digital Life Sciences

BaselArea.swiss: Enkelejda, pensez-vous que le scientifique qui ajoute à sa formation traditionnelle une perspective technologique est la nouvelle normalité?

Enkelejda Miho: La découverte de médicaments est un vaste domaine. Il y a des secteurs qui restent plutôt traditionnels tandis que d’autres, comme les données de vie réelle et les essais cliniques numériques, mutent rapidement. Les scientifiques ne peuvent plus analyser leurs données à grande échelle avec les mêmes moyens que ceux utilisés autrefois. De plus, une multitude d’outils sont prêts à être utilisés aujourd’hui. Il s’agit maintenant de trouver comment combiner ces outils afin de lancer les médicaments plus rapidement sur le marché. Appliquer une technologie de pointe pour répondre à des questions scientifiques fait entièrement partie du travail du scientifique. On entend de la part d’entreprises pharmaceutiques que le scientifique averti sur le plan technologique est un profil recherché, mais celui-ci n’est malheureusement pas forcément disponible sur le marché. L’enseignement a du retard sur ce qui se passe dans le monde réel et doit le rattraper.

Qu’est-ce qui a changé dans la compréhension de la santé?

La santé s’est développée au même titre que n’importe quel autre domaine: nous avons observé de lents processus au fil des siècles. Puis tout à coup, la technologie a fait évoluer les choses. Dans le domaine de la santé, le savoir s’est toujours concentré sur les organes, ce qui a contribué à rendre les choses moins complexes. Vous aviez le cardiologue, le pneumologue, le neurologue, qui essayaient de comprendre un problème à la fois. Le savoir était disséqué. Ceci est en train de changer massivement.

Comment?

De nouvelles technologies conduisent plus rapidement aux diagnostics et aux traitements. Par exemple, nous pouvons détecter une tumeur grâce à un algorithme. La machine aide donc le médecin spécialiste à ce qu’il ou elle puisse voir et diagnostiquer plus de patients. La première étape consiste à appliquer ce que nous savons pour accélérer les diagnostics et les traitements, sur la base d’une expérience plus large et d’un traitement des connaissances plus rapide. La seconde étape, c’est l’intégration des connaissances provenant de différents systèmes. Il y a beaucoup de technologies différentes. Nous devons maintenant nous demander comment les utiliser de manière adéquate. L’intégration des connaissances est essentielle.

Quel rôle y joue l’intelligence artificielle?

Plutôt que de poser une seule question à la fois, l’IA permet non seulement d’intégrer les données de santé mais aussi d’autres informations telles que le nombre de fois où vous vous êtes rendu chez le médecin, les traitements prescrits, les symptômes, ainsi que les données sociales et environnementales. L’IA contribue à intégrer tout cela pour nous aider à faire de meilleurs choix et de meilleurs diagnostics, si bien que les personnes ne commencent pas un traitement qui ne leur est pas adapté ou ne pâtissent pas d’un traitement qui ne leur est pas spécifique.

Sommes-nous préparés à l’innovation dans le domaine de la santé?

Nous sommes vraiment sur la bonne voie. Le premier défi à relever est la standardisation. Il n’y a aucune idée consensuelle sur quelle méthode utiliser à quel moment, et sur comment les différencier car il y en a tellement. Les groupes de recherche, laboratoires et entreprises pharmaceutiques pourraient agir davantage dans l’espace pré-concurrentiel, afin que nous ne répétions pas sans cesse les mêmes erreurs. Nous pouvons apprendre beaucoup du développement logiciel où le partage est monnaie courante. Le second défi, ce sont les distorsions que nous introduisons dans les algorithmes. Les chercheurs doivent réfléchir attentivement à faire correspondre la bonne question à la bonne série de données – un ordinateur ne peut pas faire ça. Nous avons besoin de chercheurs qui sont conscients des écueils auxquels on s’expose en appliquant l’IA et l’apprentissage automatique au domaine de la santé.

Où en sommes-nous à Bâle?

La région de Bâle est très innovatrice comparée à d’autres régions. Nous disposons d’acteurs majeurs, d’un environnement de start-ups et de grandes institutions de recherche et institutions en sciences et arts appliqués telles que l’université de Bâle, l’EPF, la FHNW et l’Institut Friedrich Miescher. Tous les éléments sont là. Je pense toutefois que les parties prenantes devraient davantage échanger, plutôt que d’essayer chacune de faire avancer seule l’ensemble de la machinerie. BaselArea.swiss et DayOne apportent un soutien en réunissant différentes perspectives. Même s’il serait bien d’y dédier plus de ressources afin de déclencher l’interaction. Cela aiderait aussi à retenir les talents dont nous avons besoin pour faire avancer ce domaine.

Qu’apporte le nouveau Master en informatique médicale?

Avec ce nouveau Master, nous comblons une lacune. En nous entretenant avec des représentants du secteur, nous nous sommes rendu compte que tout le monde se mettait à utiliser les nouvelles technologies que sont par exemple l’apprentissage automatique et l’IA. Ceci requiert des connaissances spécialisées. D’une part, vous devez maîtriser la chimie moléculaire et la biologie afin de comprendre les données que vous analysez. D’autre part, il vous faut connaître la programmation ainsi que le cadre mathématique d’application de l’apprentissage automatique. Un vaste savoir est donc nécessaire si l’on veut appliquer des données et une méthode d’apprentissage automatique bien précises à un projet très spécifique.  Vous avez besoin d’être formé en tout pour maîtriser une question bien spécifique. Voilà le défi auquel les institutions suisses et européennes ne se sont pas encore attelées.

Quelle est votre approche?

La FHNW est connue pour être une institution de sciences et d’arts appliqués sensibilisée aux questions les plus actuelles. Nous formons les étudiants sur des sujets suffisamment divers en sciences de la vie, informatique et affaires commerciales pour les impliquer ensuite dans de réels projets lancés par des entreprises pharmaceutiques et des hôpitaux. Si vous connaissez le mécanisme, vous pouvez l’appliquer à une autre question – c’est ce à quoi nous aspirons. Nos étudiants auront affaire à des projets très divers, impliquant des bases de données, des patients-citoyens, une classification et une automatisation. Comment arrivez-vous à automatiser l’analyse de clichés dans le secteur pharmaceutique ou en hôpital? Comment pouvez-vous assister les organismes de réglementation, en étant au fait des dernières tendances et des écueils à éviter? Nous sommes les premiers à avoir cette touche pédagogique. Nous formons la prochaine génération de professionnels, tout en prenant en compte la transformation numérique dans le domaine d’application.

Nous ne parlons pas de l’éthique des données?

Nous ne pouvons pas échapper à l’éthique. C’est la question la plus importante à laquelle nous sommes confrontés dans le domaine de la santé numérique. Mais parfois, il est nécessaire de se tenir au point d’équilibre afin de comprendre les besoins en matière d’éthique et de confidentialité des données. Nous tentons de répondre à ces questions dans le cadre de projets spécifiques. La discussion est un outil formidable pour préparer le terrain et sensibiliser. Nous agissons avant tout.

Quels types d’étudiants attendez-vous?

Nous voulons donner aux étudiants formés à la FHNW la possibilité de participer à des projets de pointe. D’après notre expérience, les entreprises également sont très intéressées par le programme de Master, qui relie sciences de la vie et monde des affaires sur une base informatique. Conjointement avec le Prof. Dr. Knut Hinkelmann, responsable du Master de sciences en systèmes d’information des entreprises à la FHNW, nous créons un profil d’experts qui comprennent la nécessité de la science tout en étant capables de l’appliquer en prenant en compte la cybersécurité, la confidentialité des données et les applications métier. Pour y arriver, nous formons les personnes dans la plus pure tradition de la haute école spécialisée.

L’EPF, l’université, ainsi que l’Institut tropical et de santé publique suisse, sont à l’origine de différentes initiatives dans le domaine de l’enseignement de la santé numérique. Quelle importance accordez-vous à ces efforts?

Ils sont importants et pertinents pour notre communauté. Pour moi, ces programmes ne se chevauchent pas. Tandis que l’IFM, l’EPF et l’Université de Bâle sont plus orientés vers la recherche, ici à la FHNW, nous nous dirigeons vers un enseignement axé sur l’application pratique. Nous travaillons en collaboration avec l’Université de Bâle, en particulier les bureaux d’innovation. Finalement, c’est une démarche collective.

About Enkelejda Miho

Enkelejda Miho is professor at the FHNW University of Applied Sciences and Arts Northwestern Switzerland, School of Life Sciences and serves as Dean of the Master of Medical Informatics. She is head of the Laboratory of Artificial Intelligence in Health and her research focuses on the use of computer science and artificial intelligence in drug discovery and personalized medicine. As a pioneer at ETH Zurich she created innovative methods to analyze large-scale immunogenomics data and founded the ETH spin-off aiNET. She received a PhD in Biotechnology from the ETH Zurich and a Diploma of Advanced Studies in Pharmaceutical Medicine and Medicines Development from the University of Basel. She gained her Master’s degree in Medicinal Chemistry and Technology, Pharmacy from the University of Bologna.

Learn more about the Master in Medical Informatics at the info event: Wednesday 03.04.2019, 17:00–20:00, FHNW (09.W.08), Hofackerstrasse 30, 4132 Muttenz. Register here.

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