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«Nous ne faisons aucun compromis lorsqu’il s’agit de créer l’entreprise au plus fort potentiel»
26.08.2019
Versant Ventures dispose d’une solide expérience dans la création d’entreprises performantes comme Therachon, Black Diamond ou CRISPR Therapeutics. Nous nous sommes entretenus avec Alex Mayweg, associé au sein de l’équipe Versant Ventures à Bâle, de la magie de la société de conseil Ridgeline Therapeutics, de la transposition des avancées scientifiques en programmes pharmaceutiques fructueux et des tendances futures en matière de découverte de médicaments.
Alex Mayweg, Partner at Versant Ventures
Alex, quelles sont les activités de Versant Ventures?
Alex Mayweg: Versant Ventures est une société de capital-risque leader au plan mondial qui est spécialisée dans le secteur de la biotechnologie et excelle dans les investissements précoces et la création d’entreprises. Nous venons juste de célébrer nos vingt ans d’existence. Notre stratégie vise à identifier à l’échelle globale les opportunités les plus innovantes qui sont susceptibles de révolutionner l’industrie pharmaceutique. Nous avons trois façons de procéder: nous investissons dans des entreprises existantes avec d’autres partenaires, mais dans 50% des cas, nous créons et assurons le financement initial entièrement par nous-mêmes. En plus de cela, nous exploitons des moteurs de découverte comme Ridgeline Therapeutics: ils nous permettent de développer la science, d’évaluer les risques et d’y répondre afin de transformer les découvertes en programmes de recherche et en entreprises. Pour ce faire, nous avons réuni certains des meilleurs professionnels de l’industrie pharmaceutique. Ils contribuent à faire avancer la science et à bâtir des entreprises qu’ils finissent parfois par intégrer lorsque ces sociétés nouvellement créées prennent leur essor.
Versant Ventures a établi son siège à San Francisco et dispose d’antennes aux Etats-Unis, au Canada – et à Bâle. Pourquoi avoir choisi le pôle économique bâlois?
En Europe, Versant s’appuie sur de solides antécédents. Nous avons financé ici plusieurs entreprises prospères, comme CRISPR Therapeutics ou Therachon, qui a récemment été rachetée par Pfizer. Nos bureaux de Bâle sont établis ici depuis longtemps et grâce à la société de conseil que nous avons lancée il y a trois ans, nous pouvons désormais récolter directement l’extraordinaire expertise qui existe dans la région dans le domaine de la découverte de médicaments. Des milliers de spécialistes vivent ici, ce qui est sans équivalent en Europe et rend, à mon avis, la région globalement très compétitive. Nous avons déjà investi 100 millions de dollars dans des entreprises bâloises créées avec l’aide de Ridgeline. Nous sommes très engagés localement, même si certaines de nos entreprises pourraient également être appelées à se développer aux Etats-Unis. Beaucoup ont une double implantation.
De quelle manière fonctionne Ridgeline?
A la façon d’un moteur de découverte: une excellente équipe crée des entreprises qui utilisent Ridgeline comme une ressource et un appui pour se construire. C’est un modèle magnifique. Nous créons des entreprises visionnaires qui, avant de conquérir leur indépendance, bénéficient dès le départ du soutien de personnes qui savent ce qu’elles ont à faire pour établir une base de données solide et pour mettre en place une stratégie adaptée. Nous pouvons ainsi attirer des talents que les jeunes start-up ont parfois du mal à recruter. Nous avons à disposition un pool formidable de biologistes, biologistes cellulaires, oncologues, immunologistes et chimistes dotés d’une expérience à la fois approfondie et étendue dans leurs domaines.
Dans quelle sphère se déploient vos activités?
Nous ne nous fixons aucune limite. Nous avons des entreprises qui se concentrent sur les petites molécules et sur les protéines. Les anticorps recèlent un potentiel incroyable, mais nous n’avons pour l’instant pas fait de découvertes réellement excitantes. Pour nous, la thérapie cellulaire et les autres techniques émergeant dans la région ouvrent aussi des perspectives prometteuses. Il serait très intéressant que la Suisse affirme sa présence dans ce domaine, qui se distingue selon moi par une activité en plein essor et une science d’excellence.
Où trouvez-vous la science qui vous enthousiasme – ou est-ce la science qui vous trouve?
C’est un mélange des deux. Nous identifions les thèmes dont nous pensons qu’ils vont gagner en importance et nous recherchons activement des universitaires réalisant des travaux sur ces thèmes. Nous devons miser sur l’avenir et identifier les meilleurs spécialistes. Très souvent, nous les trouvons en Europe et en Suisse, pour ainsi dire sur le pas de notre porte.
Les chercheurs sont souvent très attachés à leurs recherches, et il est connu que Versant implique souvent ses propres collaborateurs dans la création d’entreprises. Comment gérez-vous ces sources de conflits potentiels?
Je suis toujours surpris de voir combien les gens sont capables d’évoluer, ce qu’ils peuvent apprendre et comment ils s’épanouissent dans leurs carrières. Il est extrêmement important pour nous de les soutenir dans cette démarche. Force est de reconnaître que la découverte de médicaments est difficile, qu’elle exige de l’expérience et ne va pas sans quelques cicatrices dues aux échecs rencontrés pour être efficace. Si vous n’utilisez pas votre expérience et si vous ne mettez pas en place une stratégie appropriée, vous pouvez appliquer la bonne technologie à la mauvaise cible. Associer des universitaires engagés, des entrepreneurs et des équipes de spécialistes tant de la découverte de médicaments que du leadership s’est avéré très fructueux. Naturellement, cela signifie que Versant joue un rôle important dans la création des entreprises.
Nous ne faisons aucun compromis lorsqu’il s’agit de créer l’entreprise au plus fort potentiel dans un espace donné. Nous avons de grandes ambitions et je pense que c’est la bonne manière de voir les choses quant à ce qui est nécessaire pour mettre sur pied une telle entreprise. Avec plus de 150 sociétés à son actif, Versant dispose d’une expérience qui lui permet de puiser dans une vaste source de connaissances.
Avant de rejoindre Versant Ventures, vous avez travaillé dans la découverte de médicaments chez Roche. En quoi est-ce différent de poursuivre cette activité au sein d’un fonds d’investissement?
Roche est un endroit formidable – en fait, c’est là que j’ai appris presque tout ce qu’il y a à savoir sur le développement de médicaments. La biotechnologie soutenue par le capital-risque constitue une aventure très différente. Nous découvrons chaque année des centaines de technologies innovantes et il est incroyablement excitant d’avoir l’opportunité de sélectionner les plus probantes et de les intégrer à des entreprises. Nous investissons dans des innovations et des technologies à la pointe du progrès avec des équipes qui sont au départ certes restreintes, mais focalisées sur leur but. De nos jours, la disponibilité du capital est incroyable. Il est désormais possible de lancer et de mettre en œuvre des programmes de recherche avec des équipes expérimentées sans passer par les grandes compagnies pharmaceutiques ou en recourant à des sociétés de recherche contractuelles, ce qui était impossible sous cette forme il y dix ans.
Combien de capital Versant investit-il avant d’ouvrir sur l’extérieur?
Nous réservons des dizaines de millions pour nos entreprises et les montants investis dépendent toujours de l’entreprise, de la façon dont nous les faisons prospérer et dont nous les répartissons. Si une entreprise ou une technologie exigent des fonds que nous ne sommes pas en capacité d’apporter, nous pouvons faire appel plus tôt à d’autres investisseurs. Je dirais cependant que nous sommes capables de lancer des entreprises avec des capitaux beaucoup plus importants qu’habituellement dans la région.
Les sommes investies ne semblent pas cesser d’augmenter. Quelle en est la raison?
Il faut des poches bien garnies pour créer des entreprises leader dans leur domaine et lorsque la technologie est si vaste qu’elle offre des applications multiples, vous n’avez pas envie de nourrir ces opportunités au compte-goutte. Mettre au point de nouveaux médicaments est difficile et onéreux. Nous voyons des entreprises qui sont persuadées qu’elles peuvent amener une molécule au stade clinique avec trois millions de capital de départ. Nous savons qu’elles vont avoir besoin de beaucoup plus. Parallèlement, nous ne levons pas non plus des montants hors norme. Développer la biotechnologie en s’appuyant sur des fonds d’investissement constitue un modèle qui contribue à optimiser la manière dont nous utilisons le capital pour créer de la valeur.
Quel est votre premier réflexe une fois que vous avez décidé d’investir?
Nous minimisons les risques et nous explorons de possibles stratégies, ce qui signifie, entre autres, que la science doit pouvoir être reproductible si elle est mise en d’autres mains. Nous nous impliquons à un stade précoce, ce qui nous permet d’évaluer très précisément les risques scientifiques. Cette proximité nous permet de mieux comprendre ce que cela signifie de promouvoir la science et d’en devenir les promoteurs. Les scientifiques ont tendance à tomber amoureux de leurs recherches, mais si Versant est aussi convaincu de l’intérêt de leurs travaux et les valide, cela constitue un atout de poids pour lever des fonds additionnels et convaincre les investisseurs suivants.
L’échec constitue-t-il une option?
Qui dit industrie pharmaceutique dit presque inévitablement pertes. Les grandes compagnies démarrent avec 50 programmes qui sont ensuite réduits à 30 et 10 finissent par atteindre le stade clinique. Vous éliminez toujours des programmes. Il est intéressant de noter que le taux de déperdition est relativement bas au sein de notre portefeuille. La science n’en demeure pas moins la science et les fruits escomptés ne sont pas toujours au rendez-vous. Bien que nous planifions toujours la mise au point de médicaments de manière linéaire, la voie de la découverte s’avère souvent tortueuse. Il est fort possible que vous n’arriviez pas à faire ce que vous aviez prévu de faire au départ. Néanmoins, le modèle du capital-risque n’a de cesse de maximiser, de préserver et de tirer profit de la valeur générée. Il arrive rarement que vous restiez les bras croisés à laisser la situation se dégrader.
Qu’attendez-vous de l’avenir de la biotechnologie?
Si l’on se penche sur les innovations thérapeutiques qui ont jalonné l’histoire de l’industrie chimique dans la région de Bâle, on constate qu’il existe des courbes d’évolution qui couvrent plusieurs décennies. Les cycles passés ont permis d’améliorer l’espérance de vie et la survie au cancer, de réduire le taux de mortalité dû aux pathologies cancéreuses et induit un fort recul des maladies infectieuses. La biotechnologie nous fait vivre une révolution incroyable. Il y a des années de cela, les petites molécules, puis les anticorps ont été découverts. Toute une gamme d’options s’offre désormais à nous, des petites molécules aux matériaux biologiques en passant par la thérapie cellulaire, l’édition génomique, la thérapie génique et d’autres, ce qui libère un énorme potentiel d’innovation. Nous ne nous contentons pas de choisir les meilleures opportunités parmi les courbes d’évolution existantes, nous visons également à en générer de nouvelles. Comme le soulignait récemment l’un de mes partenaires chez Versant: «La meilleure technologie est celle qui n’a pas encore été inventée, mais une chose est sûre: dès qu’elle le sera, nous allons la dénicher et construire une entreprise incroyable autour d’elle.
Si vous souhaitez en apprendre plus sur la manière dont Versant Ventures fonctionne et sur son moteur de découverte Ridgeline Therapeutics, rejoignez-nous à Bâle le 18 septembre pour assister à la présentation d’Alex Mayweg: Investor Spotlight: Ridgeline Therapeutics – A Versant Ventures Discovery Engine
About Alex Mayweg
Alex Mayweg has been a partner with Versant Ventures and head of the discovery engine Ridgeline since 2016. Alex is also a member of the selection committee of BaseLaunch. He worked in drug discovery at Roche for almost 14 years, taking leading roles in research and heading global medicinal chemistry. Alex has a Ph.D. in organic chemistry. He studied at Imperial College London, gained a PhD at Oxford University and went to Stanford University for his post-doctorate training.
Interview: Annett Altvater